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Le mot minute d'Hélène
Chambre sombre. Ils baisaient depuis le matin. Le téléphone sonna. Quelle tentation encore au bout du fil ? Il hésita à répondre, tout au plaisir d’effleurer le gros orteil gauche de son amie. Elle le devança : il cria : « gueuse ! Que fais-tu ? ». Cependant, elle répondait déjà à l’inconnu au bout du fil : « à quelle heure ? Viendrez-vous seul ? » Le fruit défendu était à nouveau à sa portée. Allait-elle le faire partager à celui qui, avec la régularité des ailes d’un moulin, lui broutait les orteils ? Elle réfléchit un instant, lui passa distraitement la main sur la cuisse et se promit de le laisser en dehors de toute nouvelle découverte. Partager une autre volupté avec ce brouteur de phalanges ? Abandonnée cette idée ! A peine énoncée !
Se glissant hors du lit, elle passa devant le portrait de l’abbé Faria, le salua, et, sans aucun regret pour l’homme qui, pensa-t-elle derechef, l’ennuierait encore souvent, se vêtit rapidement et sortit, sans aucun mot.
Tout à l’observation des gens qu’elle croisait dans la rue, elle avait envie de leur jeter au visage sa prochaine victorieuse conquête, l’inconnu du bout du fil.
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